L’histoire urbanistique et sociale du quartier des Grottes au XXe siècle (dès les années 1930 notamment) peut-être racontée comme une longue “résistance à la modernisation” : à la modernisation architecturale, infrastructurelle, fonctionnelle, esthétique, à laquelle on croyait pouvoir naturellement destiner ce quartier, placé géographiquement au centre de la ville de Genève et contigu à la gare ferroviaire. La propriété publique d’une part importante du quartier – une condition rêvée par les théoriciens de l’urbanisme du XXe siècle – aurait dû garantir la réalisation des projets de construction ou d’infrastructure. Mais, au cours des décennies, les Grottes ont résisté, en ne laissant ouverte la porte qu’à des “rénovations légères” et en instaurant un paysage construit et social qui semble contredire en tout sa centralité géographique.
Cette résistance, cette instauration progressive d’une “marginalité au centre” (aussi bien revendiquée que subie) constitue-t-elle désormais un véritable destin pour les Grottes ? Le futur des Grottes débouchera-t-il désormais sur un véritable projet alternatif (social, culturel et bâti) ou, en revanche, demeurera-t-il impensé, s’auto-générant progressivement, au fur et à mesure des formes variées de la résistance ? Comment cette résistance s’est-elle exprimée, aux niveaux architectural, urbanistique, esthétique, social, politique et des comportements ? Quelles tensions a-t-elle suscitées à l’échelle plus large de l’agencement de la ville ? Quelles solutions laisse-t-elle entrevoir ?
Cette instauration progressive d’une “marginalité au centre” constitue-t-elle désormais un véritable destin pour les Grottes ?
Ces questions sont à l’origine du présent projet de recherche et de publication, initié par la Fondation Braillard Architectes et conçu par des chercheurs universitaires qui sont également des habitants genevois, concernés par les problématiques de développement urbain et régional de leur ville, telles que la pénurie de logement et l’augmentation exponentielle du trafic pendulaire. Comment devrait se jouer le destin du “village” des Grottes, sur fond de ces problématiques ?