Étapes marquantes du développement urbain de La Chaux-de-Fonds

Bien que l’urbanisme de La Chaux-de-Fonds ne date que d’une époque relativement récente – en comparaison avec les autres villes de Suisse – son histoire n’en est pas moins ponctuée d’étapes marquantes. Le présent doctorat se propose de les étudier. Chacune de ces étapes est l’œuvre d’un homme dont l’intervention va influencer, à des degrés divers, la destinée urbaine de la localité.

• Étape 1  : 1794-1795. Le 5 mai 1794, un incendie accidentel a ravagé la quasi-totalité du village. La reconstruction de la localité sinistrée est attribuée à Moïse Perret-Gentil (1744-1815), notable du lieu et graveur de son état. Introduction des premiers éléments de l’orthogonalité à travers la place de l’Hôtel-de-Ville et de la rue Neuve. Son intervention signe la genèse du système orthogonal qui augure les travaux à venir. En dépit du drame humain et des dégâts occasionnés, la catastrophe offre l’opportunité d’une reconstruction sur une base nouvelle. La hantise du feu et les exigences du métier de l’horlogerie – élevée progressivement au stade de mono-industrie – vont désormais dicter la conduite des urbanistes et des architectes.
• Étape 2  : 1831-1835. Le développement continu de l’horlogerie entraîne une croissance démographique significative. Il amène les autorités à charger l’ingénieur des Ponts et Chaussées, Charles-Henri Junod (1795-1843), à planifier un plan d’extension à grande échelle. Le document, intitulé Plan Général d’Alignements, est la pièce maîtresse de notre recherche. Il est composé d’une série de trames orthogonales diversement étirées, alternant rue, bâti et jardin. Ce modèle urbain, ainsi défini, est caractérisé par la généralisation des massifs, barres d’habitation de gabarit comparable et implantées parallèlement à l’axe de la vallée. La matrice du plan Junod sera reproduite systématiquement jusqu’au début du XXe siècle et ne sera abandonnée qu’au lendemain de la Première Guerre mondiale.
• Étape 3  : 1854-1859. L’arrivée du chemin de fer – le Jura Industriel – en 1857 à La Chaux-de-Fonds a un impact profond sur la société. L’intervention de l’ingénieur Charles-Frédéric Knab (1822-1874) a eu lieu précisément à cette date charnière. Se basant sur les travaux de son prédécesseur, C.-F. Knab inclut les infrastructures ferroviaires comme partie intégrante du son Plan d’Alignements. Sa proposition urbaine est largement suivie par les autorités locales comme le montre le plan officiel de la ville de 1869.

Au lieu de s’exclure les unes des autres, les trois étapes sus-mentionnées s’inscrivent dans une continuité urbaine et spatiale. Ainsi Charles Junod et Charles Knab prennent chacun largement en compte les travaux de leur prédécesseur. Ils les considèrent, non pas comme un modèle à remettre en question, mais au contraire, comme un héritage urbain avec lequel il faut composer.

Il ressort de notre travail que les plans Junod et Knab ne sont pas que de simples grilles orthogonales que l’on applique sans discernement sur le site de La Chaux-de-Fonds.

Il ressort de notre travail que les plans Junod et Knab ne sont pas que de simples grilles orthogonales que l’on applique sans discernement sur le site de La Chaux-de-Fonds. Leurs caractéristiques sont loin de correspondre à l’image du “plan en damier” auquel l’urbanisme de La Chaux-de-Fonds est trop souvent associé. En revanche, ces plans sont composés d’une combinaison de trames diversifiées qui s’imbriquent et se raccordent judicieusement au tissu urbain existant. Derrière leur apparente régularité, les plans Junod et Knab renferment toute une série d’irrégularités et de déclinaisons, à l’intérieur même de la trame orthogonale. Toutes ces subtilités urbaines constituent, à la fois, leur complexité et leur richesse. Les travaux des deux ingénieurs constituent un cas exemplaire de transformation urbaine, un modèle d’urbanisme remarquable.

Thèse en cours sous la direction de Luca Ortelli. Auteur : Tearanel Te. Titre : Étapes marquantes du développement urbain de La Chaux-de-Fonds. Les contributions de Moïse Perret-Gentil, de Charles-Henri Junod et Charles-Frédéric Knab. École polytechnique fédérale de Lausanne. Soutenance publique : septembre 2011.